Pas de faillite personnelle
Une autre explication, bien plus problématique, réside dans le fait que de plus en plus de personnes ne disposent plus d’aucune marge pour permettre d’entamer une médiation de dettes amiable ou judiciaire. En effet, de tels dispositifs supposent dans les faits, sinon dans les textes de loi, de pouvoir proposer un montant aux créanciers, même minime, afin de rembourser ses dettes de manière fractionnée. Or, bien souvent, les hausses du coût de la vie, de l’énergie ont mangé cette petite marge qui rend dès lors impossible la négociation.
De plus en plus de personnes ne disposent plus d’aucune marge financière pour entamer une médiation de dettes amiable ou judiciaire.
La procédure en RCD comprend la possibilité pour le juge du travail, en phase judiciaire, d’annuler tout ou partie des dettes s’il considère que la possibilité de rembourser s’avère nulle. Mais dans les faits, bien des magistrats sont réticents à accorder une telle faveur, considérant qu’elle contrevient au respect des termes d’un contrat passé entre le débiteur et le créancier. Certains évoquent même la dislocation de l’état de droit lorsque l’on évoque le concept de faillite personnelle, à l’instar de ce qui se pratique tous les jours à l’égard des entreprises dans le cadre des faillites. Cette solution est pourtant mise en pratique par nos voisins français qui, pour moitié des dossiers de surendettement traités par des commissions administratives ad hoc (dossiers également en baisse depuis le Covid), se terminent par une procédure de « rétablissement personnel » avec un effacement des dettes, à la condition d’une vente des actifs de la personne pour éponger ce qui est possible[4].
Parmi les autres pistes avancées par les chercheuses de l’OCE, on peut citer un investissement massif dans la prévention du surendettement et l’éducation financière, la revalorisation des bas salaires et la suppression des pièges à l’emploi, la suppression du statut de cohabitant et la révision du coût du logement qui pèse beaucoup trop lourdement sur le budget des ménages en difficulté. Autres propositions : travailler à la communication à propos des missions des SMD et mieux faire connaître la médiation de dettes et à qui elle est destinée, renforcer le lien entre services de première ligne et médiation de dettes.
Nathalie Cobbaut
[1] Elisa Dehon et Caroline Jeanmart, « Où sont les surendettés ? Un an après. Analyse du non (ou faible) recours à la médiation de dettes amiable et judiciaire en 2024 », pp.21-22 – pour consulter le document dans son intégralité : www.observatoire-credit.be, onglet publications.
[2] E. Dehon et C. Jeanmart, « Où sont les surendettés ? », décembre 2022, p.19
[3] A consulter sur le site de la FRB : https://media.kbs-frb.be/nl/media/11919/Baromètre%20de%20l%27Inclusion%20Numérique%202024_Publication
[4] Pour plus d’informations sur la procédure française : https://www.banque-france.fr/fr/a-votre-service/intervenants-sociaux/comprendre-procedure-surendettement#surendettement3.