Promouvoir la santé à l'école est un e-Journal destiné aux professionnels·les de la promotion de la santé à l'école et, plus largement, aux personnes intéressées par les enjeux de santé en milieu scolaire.
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Sommaire
DOSSIER Le décrochage scolaire existait avant la crise sanitaire. Mais elle l’a aggravé. Or ce phénomène en dit long sur l’état de mal-être des jeunes. En effet, cette problématique n’est pas qu’éducative : elle touche aussi à la santé et à la santé publique. Dans ce contexte, quelle est la place des médecins scolaires ? Le TFE du Dr Claire Langhoor permet d’y réfléchir.
PORTRAIT Retour sur le parcours d’une médecin scolaire engagée, le Dr Fabienne Henry : la désormais retraitée n’a rien perdu de son franc-parler.
EN BREF Un nouvel appel à projets pour Ne Tournons Pas Autour du Pot. Une étude sur la santé mentale des jeunes pendant la crise sanitaire.
PIPSA Des outils qui ouvrent des espaces de parole afin d’exercer et de développer l’expression, l’écoute, l’échange, la communication, le lien.
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Le décrochage scolaire, un défi de plus…
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Faut-il ajouter le dépistage du décrochage scolaire aux missions des équipes ? Et dans ce cas, que s’agit-il de repérer ? Comment être utile ? Un TFE, réalisé par le Dr Claire Langhoor, fait le tour de la question, en proposant des pistes d’action (et/ou de réflexion).
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Le titre du TFE présenté en 2021 par le Dr Claire Langhoor est on ne peut plus clair : « Le décrochage scolaire : un véritable défi en PSE ». De fait, pour un défi, c’est (ou ce serait) un sacré défi ! Difficulté supplémentaire : mieux vaudrait ne pas réfléchir pendant des années avant de s’engager dans un sens ou dans l’autre. En effet, depuis la crise sanitaire, ce phénomène de décrochage évolue encore plus négativement qu’auparavant. Il en va d’ailleurs de même de l’absentéisme scolaire (un phénomène différent du décrochage, ne serait-ce que parce que ce dernier n’émane pas forcément du ressenti de l‘élève par rapport à la scolarité) : en 2020-2021, il est passé de 6,59 % à 8,95 % à Bruxelles, et de 4,49 % à 6,5 % en Wallonie, le tout entraînant l’ouverture de 49 405 dossiers en FWB.
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En février 2021, Caroline Désir, la ministre de l’Enseignement, avait annoncé un plan pour combattre l’accélération du décrochage générée par la crise. Une urgence ? Bernard De Vos, Délégué général aux droits de l’enfant, en est persuadé. Dans une interview (lire ci-dessous), il souligne que les chiffres du décrochage - une problématique qui relève tant de l’éducatif que de la santé, rappelle-t-il - sont probablement sous-évalués. De plus, la crise sanitaire a fait naître des fragilités susceptibles de révéler leurs conséquences dans les années à venir. Et cela inclut un risque accru de décrochages. Au printemps dernier, les experts de la santé mentale estimaient à 50 % le pourcentage d’adolescents qui avaient décroché… Autant dire que les feux sont désormais au rouge.
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Dans son TFE, le Dr Claire Langhoor rappelle que le décrochage désigne un processus multifactoriel par lequel un jeune commence à se désintéresser de l’école, des apprentissages et/ou de la vie sociale. Ce phénomène se manifeste sous plusieurs formes. L’une, passive, se traduit par du désintérêt, de la passivité, un absentéisme occasionnel, une apathie, une possible violence. L’autre, active, entraine une sortie du système scolaire et une déscolarisation. En tout cas, ce processus peut aboutir à un abandon scolaire précoce, avec pour résultat des jeunes de 18 à 24 ans qui n’ont pas atteint la fin de l’enseignement secondaire inférieur et ne suivent aucune autre formation. Cette situation concernerait 8,4 % de jeunes en Belgique (10,9 % en Wallonie).
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Les conséquences d’un décrochage sont loin d’être anodines. Elles affectent le jeune, sa famille et la société. Pour la personne, les conséquences se répercutent sur la santé, avec des comportements à risque, des troubles psychologiques et une dévalorisation de soi susceptible d’entraîner des troubles du comportement, de la violence, des tentatives de suicide…
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« Dans une société structurée autour de la réussite scolaire, il n’y a pas de place pour les jeunes décrocheurs », écrit le Dr Claire Langhoor. De plus, l’inadaptation sociale peut, aussi, mener à la délinquance. En pratique, ces jeunes présentent des difficultés d’intégration sur le marché du travail et des difficultés à garder un travail. Lorsqu’ils travaillent, ils occupent des emplois précaires et peu rémunérés. Leur taux de chômage est élevé. En fait, « Le décrochage scolaire coûte cher à l’individu, à la société et à l’économie », résume-t-elle. C’est, aussi, un problème majeur en santé publique, qui concerne tant le milieu scolaire et éducatif que les professionnels de la santé. Voilà pourquoi, soutient-elle, comme intervenant en médecine préventive et en santé publique, le médecin scolaire pourrait avoir un rôle majeur à jouer.
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Pourtant, tout est à créer, ou presque dans ce domaine pour lequel la littérature ne définit pas de place à la médecine scolaire. Jusqu’à présent, les médecins scolaires ne semblent pas vraiment faire partie d’une boucle ou d’un réseau cohérent centré autour de l’intérêt et la santé de l’enfant en situation de décrochage. Ainsi, par exemple, lorsque l’E-Journal PSE a contacté Stéphanie Sarlet, directrice de Rebonds (une antenne qui s’occupe de jeunes en décrochage scolaire), cette dernière n’a pas caché sa surprise : la place des médecins scolaires n’avait jamais fait partie de ses interrogations. Néanmoins, après réflexion, elle pense qu’ils pourraient effectivement apporter leur pierre à l’édifice (lire l’article ci-dessous).
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Dans son TFE, le Dr Claire Langhoor ne se contente pas de rappeler les apports théoriques concernant le décrochage scolaire. Elle bouscule les normes. Voilà ses constats (lire les articles ci-dessous), ses interrogations, ses suggestions. Pour les faire nôtres ?
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« Dans des écoles, on fait des miracles. Dans d’autres, c’est la cata… »
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Le décrochage n’est pas uniquement un problème éducatif : c’est, aussi, un problème de santé et de prévention. Une bonne raison pour ne pas exclure de cette problématique les médecins scolaires, assure Bernard De Vos, Délégué général aux droits de l’enfant.
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Le décrochage scolaire est-il une urgence ?
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Bernard De Vos - Il y avait déjà bien des raisons de s’en inquiéter avant la crise sanitaire. Mais, comme beaucoup d’autres sujets, son ampleur s’est révélée plus encore avec la pandémie. Et il y a du souci à se faire, car bien des gamins sont sur le fil. De plus, le phénomène dépasse largement les chiffres annuels qu’on nous propose : en réalité, le décrochage concerne aussi tous ces élèves « passifs » qui sont à l’école sans en voir le but. Parmi eux, se trouvent ceux qui vont décrocher complètement en raison des conditions qui sont imposées aux jeunes depuis la crise et auxquelles on semble commencer à « s’habituer », sans plus considérer l’ampleur de leurs impacts.
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Tout comme des pédiatres, des pédopsychiatres, des psychologues, des professionnels de l’enfance, pendant cette crise sanitaire, j’ai plaidé pour une reprise de l’école, pour dire l’importance d’en faire un lieu d’espace de parole, pour rappeler son importance grâce à la possibilité qu’elle donne aux jeunes de se réconcilier avec eux-mêmes en étant au contact avec les autres. Mais nous venons de connaître un renversement du paradigme qui faisait de l’enfant et de l’école notre priorité… Les jeunes ont été ceux qui ont le plus payé la crise.
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La mobilisation actuelle contre l’exclusion scolaire est-elle suffisante ?
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- Non. Sa considération est bien trop faible. Bien sûr, il y a des expériences et des enseignants de qualité qui s’en préoccupent. Mais, aussi, des écoles et des enseignants qui ne sont pas à la hauteur. Souvent, ça coince. Or le décrochage est aussi une voie qui mène vers l’exclusion. En effet, souvent, il suffit d’un motif supplémentaire pour que l’école prononce l’exclusion du décrocheur. Or il suffit de voir les chiffres de l’Aide à la Jeunesse pour comprendre qu’être « lourdé » de l’école n’est pas une obligation pour entraîner un appel aux services de protection de l’enfance, mais que cela y « aide » grandement !
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Les médecins scolaires ont-ils un rôle à jouer ?
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- On leur a donné des responsabilités énormes - et non compatibles avec leurs missions essentielles - en matière de testing, de tracing, alors qu’ils devraient être davantage en contact avec ces questions, qui relèvent de la santé. Il ne s’agit pas uniquement d’un problème scolaire. Les jeunes ne vont pas bien. Être en décrochage, cela veut dire quelque chose. Et cela induit aussi des risques pour l’environnement du jeune et pour la société.
Dans ce contexte, la séparation entre les SPSE et les CPMS n’aide en rien. Ces deux dispositifs devraient être davantage intégrés et/ou réaliser des rencontres plus régulières.
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Que changer dans les réponses apportées au décrochage ?
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- Souvent, quand un jeune décroche, on lui propose un contrat de ré-accrochage scolaire. Mais cet accord est généralement à sens unique : l’établissement ne fait pas forcément quelque chose pour permettre au jeune d’être capable de respecter le contrat. On laisse l’élève se débrouiller. Parfois, heureusement, des écoles proposent des aides, comme un texto le matin pour encourager à se lever et à venir, ou quelqu’un qui vient jusqu’au domicile et accompagne le jeune à l’école, etc. Dans certaines écoles, il y a des miracles. Dans d’autres, c’est la cata…
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- Les juges de la jeunesse le disent : de plus en plus, ils voient des jeunes dépressifs, sans motivation, qui ont perdu l’envie et l’enthousiasme. Durant cette crise, on ne s’est pas adressé aux jeunes. Une seule ministre, Caroline Désir, a voulu le faire lors d’un JT de RTL, mais la journaliste l’a rapidement remise sur les rails. Pourtant, les jeunes ont besoin d’un discours cadrant et rassurant. Leur activité principale, c’est d’aller à l’école. Si on les en prive, comment vont-ils remplir leur vie ? Par du vide ? Par des activités dont ils ont envie mais qui ne sont pas forcément adaptées ? Par des choses contre-productives ? Des initiatives mobilisatrices ou participatives leur ont été proposées de manière trop peu fréquente ou de façon anecdotique. Pour les jeunes, on a géré de façon catastrophique.
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Avant même d’être Délégué aux droits de l’enfant, je plaidais pour un système que l’on pourrait peut-être adopter enfin… Actuellement, l’école a l’obligation d’avoir une collaboration avec un poste de police, qui est son relais. Je propose de recommander aussi à toutes les écoles de trouver, dans leur environnement, une série d’acteurs qui deviendraient, pour chaque année scolaire, une référence, un relais en matière de violence, de décrochage, de harcèlement, de toxicomanie (tous les établissements sont confrontés à ces sujets). Les médecins scolaires pourraient évidemment s’impliquer sur ces thèmes.
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Tous les ans, une réunion permettrait aux différents acteurs de se rencontrer, de prévoir des stratégies concertées, de fixer les modes de communication, etc. L’idée ? S’organiser en amont pour intervenir, sortir du « l’école tente de régler seule ses problèmes » et cesser de jouer aux pompiers, mobilisés tardivement ou dans l’urgence. Car c’est cette urgence qui explique aussi pourquoi les services, dont ceux de la PSE, sont débordés… Cette organisation contribuerait également à défendre le concept selon lequel la santé mentale doit être prise en compte dès l’école.
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Qui sont-ils ? Quelles causes peuvent mener au décrochage scolaire ? Le Dr Claire Langhoor donne de précieuses indications à ce propos.
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Face au décrochage scolaire, souligne le Dr Claire Langhoor dans son TFE, la vigilance devrait être présente très tôt. En primaire, on parle plutôt d’échec, de difficultés scolaires ou d’élève présentant un risque de décrocher dans un futur proche. Cependant, « les difficultés scolaires non résolues en primaire (échec, difficultés d’apprentissage ou d’adaptation) sont un risque important de décrochage dans le secondaire. Plus l’intervention est précoce, plus il y a de chances de favoriser la réussite et la poursuite des études », note-t-elle.
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Dans la littérature, on constate qu’aucun facteur ne permet à lui seul de repérer un décrochage. Trois séries de facteurs sont cependant relevées. L’un de ces facteurs concerne le contexte scolaire, ce qui recouvre l’engagement de l’enseignant, un climat scolaire négatif (harcèlement, difficultés de relations avec les pairs ou avec les adultes encadrants, fonctionnement de l’institution, insécurité…), l’étiquetage et le redoublement. Les autres facteurs relèvent de l’individuel et du milieu familial.
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Des études proposent un classement du décrochage par âge, avec des facteurs de risque (ou de protection) spécifiques selon ces âges. De 0 à 4 ans, les troubles de l’audition sont le principal facteur de risque, alors que la présence d’une fratrie protège. De 4 à 8 ans, deux facteurs de risque sont pointés : les difficultés d’apprentissage, sources de retards accumulés entrainant une baisse d’estime de soi et une perte de motivation, et les plaintes physiques ou les maladies fréquentes, qui génèrent des absences. A contrario, la participation à des activités sportives extrascolaires est un élément protecteur.
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De 8 à 12 ans, les troubles du comportement, l’agitation, l’impulsivité, l’agressivité, la désobéissance sont autant de facteurs de risque. Enfin, entre 12 et 16, les difficultés d’apprentissage, une puberté précoce, des plaintes et troubles psychologiques mais, aussi, un contexte familial difficile et un manque d’autonomie sont autant de facteurs de risques. L’absentéisme ou la stratégie d’évitement sont alors à la fois la cause et la conséquence du décrochage. En revanche, dans cette tranche d’âge, une bonne estime de soi et un sentiment d’efficacité personnelle sont considérés comme protecteurs.
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Des chercheurs proposent également une répartition des différents types de décrocheurs parmi les jeunes du secondaire. Selon eux, 40 % sont inadaptés à l’institution scolaire, avec des comportements contestataires entraînant une rupture de la communication, 10 % sont des désengagés ayant perdu tout intérêt pour l’école, et dont la passivité mène à l’absentéisme et à d’éventuelles conduites addictives. On compte aussi 40 % de discrets et 10 % de jeunes qualifiés de « sous-performant » (un terme assez « brutal » employé par certains chercheurs, et qui ne serait sans doute pas celui qu’utiliseraient des professionnels soucieux ne pas stigmatiser). Cette classification regroupe des jeunes très en retrait, dépressifs, avec des difficultés de concentration.
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A tout âge, d’autres facteurs de risque sont également présents. Parmi eux, on note les relations difficiles avec les parents, les événements de vie anxiogènes (un deuil, un divorce, la mort d’un animal de compagnie), le fait de grandir dans une famille monoparentale et/ou dans un milieu social défavorisé ou d’origine non-occidentale. Le faible niveau de scolarité des parents, l’absence aux visites scolaires et le fait d’être un garçon s’y ajoutent. A contrario, les jeunes sont davantage protégés lorsqu’on leur confie des responsabilités adaptées à leur âge, qu’ils appartiennent à un groupe de pairs ou ont développé une relation de qualité avec les enseignants et les parents. Entre le primaire et le secondaire, le décrochage s’enracine principalement dans l’anxiété liée à la transition et au retard scolaire accumulé.
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En 2011, une enquête menée en Région bruxelloise avait également pointé quatre indicateurs représentatifs de 50 % des causes de décrochage : la consommation de psychotropes, la valeur accordée à l’école et aux apprentissages, un retrait en classe, avoir des amis qui ont l’intention d’abandonner l’école. Deux profils à haut risque étaient mis en exergue : les jeunes multirisques et les désengagés. Le point central de cette problématique semble en tout cas tourner autour d’une faible motivation et un faible engagement scolaire.
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Plusieurs facteurs de risques aident au repérage des jeunes en décrochage scolaire : une baisse des résultats scolaires, des plaintes psychologiques et somatiques à répétition, le nombre élevé de certificats médicaux (et/ou des certificats de médecins différents). Les principales plaintes exprimées par le jeune sont la tristesse, la dépression, l’anxiété. Il peut connaître aussi des troubles du comportement. Sur un plan somatique, on note de possibles diarrhées, de la fatigue, des céphalées, des nausées, des palpitations, des douleurs abdominales, des tremblements, des troubles du sommeil.
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Ses rencontres avec des acteurs de la PSE ont permis au Dr Claire Langhoor de confirmer que ce sujet était très peu abordé en médecine scolaire. Pourtant, il est possible de repérer certains signes précurseurs de décrochage scolaire lors du bilan de santé, comme un mal-être, des difficultés sociales ou familiales. Des questionnaires spécifiques permettent d’aider à prédire le décrochage à court terme (un an) et à classer les élèves selon des niveaux de risque. « Ils pourraient être remplis et analysés par les services PSE, puis transmis aux CPMS en cas d’inquiétude », suggère le Dr Claire Langhoor. En tout cas, actuellement, ce repérage n’est pas systématique, constate-t-elle. Cela dit, pour suivre la voie qu’elle propose, un accord de partenariat préalable et un point sur le partage de données confidentielles seraient probablement nécessaires.
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De manière générale, les services PSE pourraient également stimuler la tenue d’animations pour développer l’estime de soi ou des séances d’information sur la réorientation ou, encore, sur la visibilité des CPMS. Cependant, au final, admet le Dr Claire Langhoor, « les services se sentent peu outillés pour faire face au décrochage…» Parfois, quand le décrochage est couvert par des certificats médicaux, des contacts sont pris avec le médecin traitant. Actuellement, les acteurs de la PSE voient donc surtout leur rôle comme le fait de relayer des inquiétudes par rapport à certains élèves. Il y a, constate-t-elle, « un sentiment d’être démunis par rapport à des situations complexes et une méconnaissance du réseau de référence. »
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De manière générale, les services PSE pourraient également stimuler la tenue d’animations pour développer l’estime de soi ou des séances d’information sur la réorientation ou, encore, sur la visibilité des CPMS. Cependant, au final, admet le Dr Claire Langhoor, « les services se sentent peu outillés pour faire face au décrochage…» Parfois, quand le décrochage est couvert par des certificats médicaux, des contacts sont pris avec le médecin traitant. Actuellement, les acteurs de la PSE voient donc surtout leur rôle comme le fait de relayer des inquiétudes par rapport à certains élèves. Il y a, constate-t-elle, « un sentiment d’être démunis par rapport à des situations complexes et une méconnaissance du réseau de référence. »
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Les axes (théoriques) de la prévention
De manière générale, en Europe, on considère que la prévention du décrochage scolaire passe par des politiques ciblées, avec des mesures adaptées aux groupes à risque, l’amélioration de l’apprentissage de la langue d’enseignement, l’amélioration de l’offre et de la qualité de l’éducation dans la petite enfance, davantage de moyens dans les zones défavorisées, la limitation des redoublements, la valorisation des formations en alternance, la revalorisation de l’attractivité pour les formations professionnalisantes, etc. De manière plus précise, selon le Pr Pierre Potvin, l’intervention préventive doit cibler les apprentissages et la réussite dans les matières de base, l’engagement scolaire, les troubles du comportement, le climat de classe et l’engagement parental. Il s’agit aussi, en primaire, de préparer l’entrée des enfants défavorisés ou en difficulté et/ou de diminuer le nombre d’élèves par classe.
En Fédération Wallonie-Bruxelles, des processus d’accrochage scolaire sont développés, avec un repérage précoce des comportements annonciateurs pour une prise en charge rapide des élèves à risque, une approche personnalisée d’apprentissage et d’orientation. La priorité est mise sur un climat scolaire positif. Au niveau éducatif, la prévention passe par des actions pour valoriser l’élève, donner goût à l’apprentissage, conforter la confiance en soi. Une augmentation des contrats d’apprentissage et une revalorisation des filières qualifiantes sont également préconisées.
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Des pistes pratiques pour prévenir…
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Il est plus facile de maintenir un jeune à l’école que de l’y ramener, souligne le Dr Claire Langhoor. Pour le médecin scolaire, en plus d’être attentif aux signes pouvant indiquer un décrochage, voici des pistes d’interventions. Et quelques suggestions.
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- Lors des visites d’école, le médecin scolaire peut avoir comme rôle d’encourager les actions qui ont pour but de diminuer les conflits entre élèves et visent un climat scolaire positif (avec, par exemple, la réorganisation des espaces de la cour de récréation).
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- Les bilans de santé sont l’occasion de parler avec le jeune et de détecter des fragilités. Il s’agit d’être attentif par rapport à un mal-être, un repli sur soi, de mauvais résultats scolaires, un manque de confiance en soi, des troubles alimentaires. On estime que 50% des décrocheurs passent inaperçus en classe (les désengagés et les discrets). Mais un questionnaire sur les facteurs de risque n’est pas suffisant : une approche globale et personnalisée (avec du bon sens, de l’empathie, de l’écoute) doit le compléter.
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Le moindre doute devrait être consigné dans le dossier de l’enfant. Le suivi de l’évolution lors des bilans est important.
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- Dans la mesure où le passage en secondaire reste un moment charnière, en cas de fragilité préexistante, le décrochage risque de se dérouler à ce moment-là. Les bilans de santé sont donc également utiles pour évaluer la transition dans le secondaire, y compris en investiguant, dès la 6e primaire, les craintes, le mal-être, les difficultés scolaires, les facteurs de risque de décrochage. Ces données, relayées à l’enseignant, aideraient à ce qu’il prépare au mieux les élèves.
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Le médecin scolaire peut également être attentif à l’accueil des élèves de 1ère secondaire (par exemple en sensibilisant à l’intérêt d’une journée d’intégration et/ou à la création de liens avec des élèves plus âgés…).
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- En cas de grande fragilité de l’enfant, avec l’accord des parents et du jeune - un interlocuteur trop souvent oublié -, l’établissement du secondaire pourrait être prévenu, en prenant néanmoins en compte le risque d‘étiquetage.
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- Quand le médecin scolaire est prévenu de situations particulières comme un deuil, une maladie grave, un traumatisme, avec l’accord des parents et du jeune, l’enseignant pourrait être prévenu.
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- Un recueil systématique des données pourrait orienter les politiques de prévention du dépistage.
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- Il est rare que les SPSE soient prévenus des jours d’absence scolaire en primaire. Cet élément peut contribuer à des interventions souvent tardives dans le processus. Il serait pourtant intéressant d’être informé des absences, même couvertes par des certificats. En Flandre, dans le secondaire, une obligation de rencontre avec un centre de guidance est prévue dès 10 à 12 jours d’absence.
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- Peu connu et peu utilisé, le dossier d’évolution constitué par l’établissement scolaire offre une bonne base de dépistage (tout comme le dossier du PMS).
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- Une collaboration SPSE-CPMS est nécessaire, alors qu’elle est actuellement quasi inexistante. Il s’agit de décloisonner et de communiquer. En effet, chacun des dossiers, vus ensemble, permettrait un dépistage plus précoce grâce aux différents indices qu’ils contiennent respectivement.
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- Le dépistage relève clairement de la prévention. Mais le dépistage est-il une fin en soi ? Ou bien faut-il envisager aussi des pistes en matière de prise en charge et d’interventions ? Dans ce cadre, suggère Claire Langhoor, bien que cela n’entre pas vraiment dans ses compétences , la médecine scolaire pourrait dans certains cas apporter des conseils aux parents (par exemple, pour aider à la motivation du jeune, ou lors de troubles d’apprentissage ou de difficultés comportementales pour inciter le jeune à exprimer ses émotions, à augmenter son estime de soi, à mener des activités destinées à diminuer la tristesse ou des activités extrascolaires). Et aussi servir d’intermédiaire avec le médecin traitant.
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- Les systèmes éducatif et de santé sont des systèmes rigides, avec des règles limitatives (comme, par exemple, pour le secret professionnel) : la médecine scolaire peut trianguler, être un lien entre les deux pour une collaboration et un accompagnement individualisé.
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Comment faire rebondir les « décrocheurs »
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L’Espace Tremplin se consacre au « ré-accrochage » des jeunes en rupture scolaire. Qui sont-ils ? Que leur propose-t-on ? Quelle place les équipes PSE pourraient-elles occuper dans ce processus ? Voilà les explications et l’analyse de Stéphanie Sarlet, directrice de l’Espace Tremplin (asbl Rebonds).
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Au confluent entre l’Enseignement et l’Aide à la Jeunesse qui le subsidient tous les deux (ainsi que la Province de Liège), le projet Rebonds trace sa route depuis vingt ans. Son équipe pluridisciplinaire accueille 16 jeunes de 12 à 18 ans au sein de ses antennes, dont l’Espace Tremplin. Ici, les élèves sont en situation de crise, de décrochage, d’absentéisme ou d’exclusion scolaire.
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Les équipes travaillent avec eux le ré-accrochage, via trois axes, détaille Stéphanie Sarlet, la directrice. L’un d’entre eux concerne l’accompagnement social : il inclut une collaboration systématique avec la famille et l’école mais aussi, parfois, d’autres intervenants. Le deuxième axe est éducatif : apprendre à se connaître, à s’exprimer, construire un projet, créer des liens positifs avec l’adulte, accepter des règles… Le dernier axe, pédagogique, vise à prendre conscience de ses compétences, à mettre du sens à sa scolarité, à devenir acteur de son apprentissage, etc. Précision utile : aucun psychologue ne travaille ici. Si nécessaire, le jeune est orienté vers un thérapeute (en CPMS ou en Centre de santé mentale, par exemple).
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En pratique, « une grande part du travail se réalise en groupe, avec des ateliers scolaires et des activités culturelles ou sportives adaptées à l’âge et à la dynamique du groupe, poursuit Stéphanie Sarlet. Individuellement, chaque jeune dispose d’un référent, avec lequel un entretien permet de faire le point sur les objectifs fixés. » L’idée ? S’adapter le plus possible au jeune afin de travailler ses difficultés lors des ateliers mais, aussi, l’ouvrir à d’autres perspectives et à d’autres réflexions. Par exemple, la possibilité d’entamer un projet de formation peut être abordée, y compris via une réorientation lorsque l’école ne convient pas à l’élève et que, par exemple, un cursus plus manuel serait plus judicieux. Néanmoins, le mercredi est systématiquement destiné à reprendre contact avec l’école : le jeune est poussé à y suivre les cours (ou l’un d’entre eux) ou bien au moins à passer chercher ses cours.
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La prise en charge au sein de Rebonds est fixée à une durée maximale de trois mois, renouvelable une seule fois. Sur l’ensemble de sa scolarité, un jeune ne peut pas y être accepté plus d’une année. En général, à partir du mois de janvier, une liste d’attente est à prévoir : les problèmes (et la multiplication de certificats médicaux) ont eu le temps d’apparaître et/ou les écoles, qui n’ont plus leur quota d’élèves, commencent à contacter l’asbl.
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« Ces dernières années, il y a eu un changement important dans notre public. Auparavant, nous recevions des jeunes en opposition avec le système scolaire, en rébellion avec ce dernier, souvent au point de s’en faire exclure. Actuellement, il s’agit de jeunes présentant un repli sur eux-mêmes, un malaise, ou souffrant de troubles psychologiques, d’angoisse ou de phobie scolaire. Un jeune peut se mettre à pleurer rien qu’à l’idée de retourner dans son établissement… Actuellement, on constate de fréquentes psycho-somatisations qui se traduisent par des manifestations physiques comme, par exemple, des évanouissements. Certains jeunes nous disent : ‘C’était bien, pendant le confinement ‘. En fait, la pandémie a révélé des situations problématiques. L’une d’elle consiste à trouver que c’est ‘top’ de rester enfermé chez soi, sans plus ressentir le besoin d’amis, de contacts, et en évitant la vie et les richesses qu’elle apporte », déplore Stéphanie Sarlet.
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Au sein de l’équipe de Rebonds, on s’interroge parfois devant des certificats médicaux qui semblent couvrir très (trop ?) facilement les absences de certains jeunes. Stéphanie Sarlet évoque le cas de l’un d‘entre eux laissé seul, chez lui, pendant six mois, sans plus envie de rien (et sans jamais voir un CPMS). Ou des certificats de trois mois ne couvrant aucune raison physique. Dès lors, il arrive qu’un médecin traitant soit contacté par le centre. Avec les services de la PMS, des liens existent de temps en temps, du moins si le jeune était suivi au préalable par ce service, ou pour la phase de réintégration dans l’établissement, mais cette démarche n’est pas systématique. Quant aux services PSE, le « réflexe » de les joindre ne semble pas être une évidence…
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Stéphanie Sarlet ne le cache pas : le rôle des équipes de la PSE ne lui était pas vraiment venu à l’esprit avant que l’E-Journal PSE la contacte et lui demande son avis sur le sujet. Néanmoins, lors de la discussion, elle constate qu’en fait, « des relations avec ces médecins pourraient être utiles, d’autant que les jeunes que nous voyons présentent fréquemment des manifestations physiques liées à des états d’angoisse. Nous voulons travailler dans l’intérêt du jeune. Or il faut constater qu’actuellement, nous nous trouvons dans un système et un réseau qui manquent de cohérence. »
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« Nous intervenons dans l’après, souligne la directrice. Des interventions en amont, au sein de l’école, seraient pourtant utiles. C’est le cas pour des animations post-Covid tout comme pour des mesures destinées à encourager le bien-être à l’école, par exemple via des cellules bien-être. Le mal-être d’un jeune peut le mener au décrochage. Il s’agit donc d’y être davantage attentifs et d’intervenir plus rapidement auprès de jeunes qui ne semblent pas aller bien ou qui vont mal. Agir sur les individus, sur leur bien-être, encourager leur confiance en eux, tout cela devrait entrer dans nos cultures. » Sur ce plan-là, au moins, qui pourrait dire que les SPSE n’ont pas un rôle à jouer ?
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Fabienne Henry, acte 3, scène 1
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Elle a été médecin dans un SPSE, puis elle l’a dirigé. Désormais, Fabienne Henry, qui présidait également la Commission d’avis PSE, a pris sa pension. Petit retour sur une vie professionnelle engagée et riche en enseignements pour ceux qui restent…
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On ne pensait pas cela possible mais même pour elle, le moment de la pension a fini par sonner. A la rentrée de 2021, le Dr Fabienne Henry a cessé de diriger le SPSE de Bruxelles et de présider la Commission d‘avis PSE. Pourtant, et cela n’étonnera probablement pas ceux qui la connaissent, elle n’a pas vraiment arrêté de travailler. Sa fonction de présidente du CPAS de Woluwe-Saint-Lambert l’occupe un bon trois-quarts temps. De quoi lui faire dire qu’elle est désormais « nettement plus relax » et nantie de bien davantage de temps pour ses petits-enfants…
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Petit retour sur son passé. Cette fille et arrière-petite-fille de médecin avait hésité : allait-elle devenir actrice de théâtre ou médecin ? La perspective d’un style de vie plus « traditionnel », « moins saltimbanque » a fait pencher la balance. Bon casting ! Actuellement, elle ne semble pas regretter son choix un seul instant : elle est toujours autant attirée, intéressée et motivée par la santé publique.
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Fabienne Henry s’est mariée pendant ses études et a eu deux enfants durant ces dernières (lors de deux de ses doctorats). Dans sa tête, tout était déjà clair : elle voulait s’investir à la fois dans son métier ET dans sa vie de famille. Un graduat en santé publique mené à l’ULB – « il m’a donné un éclairage différent de ma formation médicale », glisse-t-elle -, a fourni à cette épouse d’indépendant les clés (et le diplôme nécessaire) pour y parvenir.
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En attendant de trouver un emploi en médecine scolaire, elle a largement tiré profit de son passage par un centre de Planning familial. Elle y a vu, entre autres, l’impact des inégalités en santé. Elle y a apprécié aussi les débats éthiques et les rencontres pluridisciplinaires. « J’ai compris à ce moment-là qu’après avoir pesé le pour et le contre, j’étais capable de changer d’avis, en particulier sur les modalités pour atteindre des objectifs. Mais je suis toujours restée fidèle à mes engagements sur des sujets fondamentaux, comme l’avortement ou l’euthanasie. » Et elle a toujours fait de même à l’égard de son parti (DEFI).
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Une rencontre seul·e à seul·e
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Quelques petites années plus tard, en 1987, son arrivée comme médecin scolaire à la Ville de Bruxelles « correspondait à mes attentes ». On parle encore, à cette époque, d’inspection médicale scolaire. Mais « tout dépend de la manière d’envisager son métier », remarque-t-elle. A ses yeux, son job consistait déjà à faire adhérer aux programmes proposés par le service (dans son cas, l‘EVRAS et la vaccination figuraient en tête d’affiche), tout en expliquant aux enfants pourquoi on leur propose ceci ou cela. « Quel que soit l’âge, la façon dont on s’adresse à un jeune ou à un groupe d’enfants conditionne son futur rapport à la médecine », assure-t-elle. Autre point important : « La médecine scolaire permet aux jeunes de rencontrer seul un médecin, et c’est souvent la toute première fois que cela leur arrive », souligne-t-elle. Une raison de plus, souffle-t-elle, pour voir la personne dans sa globalité…
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Des consultations, des animations et, dès que possible, une pratique affranchie des vieilles hiérarchies afin de privilégier un travail en binôme médecin/infirmier – ce qui n’exclut pas une discussion avec les instituteurs - : voilà le modèle qu’elle a apprécié. « Par chance, le service de la ville de Bruxelles avait facilité notre travail en créant un poste d’inspecteur pédagogique en charge de la santé et des sports. Il faisait le lien entre les différents protagonistes et facilitait les relations avec les directions d’écoles ou les enseignants. Nos nombreux projets et animations ont toujours reçu son soutien. » Ces projets étaient fondés sur une même philosophie : si des experts étaient consultés, ils étaient là pour donner des infos. A charge, ensuite, de faire des jeunes des partenaires aptes à poser leurs propres choix. « Les enfants nous apprennent beaucoup. D’ailleurs, leurs questions nous indiquent ce qu’ils ont compris et ce sur quoi il faut insister », soutient-elle.
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Fervente convaincue par l’intérêt du bilan de santé, elle considère qu’ils sont placés « aux bons moments » pour assurer les dépistages qui s’imposent : scoliose, problèmes cardiaques, acuité visuelle, caries ou malpositions dentaires, mais aussi les acquis avant le passage en primaire ou la transition vers l’adolescence avant le secondaire. Le tout sans oublier la maltraitance.
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Le Dr Fabienne Henry a participé aux groupes de travail du nouveau décret de 2001 et à l’inscription de la promotion de la santé dans les textes, avec l’essor du bilan de santé, la définition de son contenu et la mise en avant des visites de locaux. Actuellement, elle imagine d’autres ajouts possibles à ce décret, avec d’autres scénarios : dans l’un d’entre eux, les services PMS et PSE cesseraient d’être scindés comme ils le sont, puisqu’ « on parle du même enfant ». Pour le reste, son « pitch » se fonderait sur ces questions : « En repartant d’une page blanche et compte tenu de nos effectifs, en Communauté française, quel système de santé global mettre en place ? Que faut-il pour améliorer la santé publique, en termes de service universel, gratuit, obligatoire et non susceptible de creuser les inégalités de santé ? » Pragmatique (ou optimiste ? A chacun de décider), elle estime que si on débute maintenant la réflexion, un système repensé pourrait voir le jour dans une grosse dizaine d’années.
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Durant sa carrière, bien sûr, elle a aussi connu les grands bouleversements traversés par tous les services et leurs grands questionnements, comme par exemple sur la (les) manière(s) de construire et d’écrire un projet de service. « C’était compliqué, difficile, comme tout changement, mais on savait que c’était pour aller vers une amélioration », tranche-t-elle.
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En 2003, sa responsable, le Dr Michèle Meerseman, a pris sa pension et lui a demandé de la remplacer. Signe que l’on parle d’une autre époque, la transition s’est déroulée sans assessment, interview ou autres formalités… En tout cas, ce poste de médecin responsable est arrivé à un moment où ses enfants, plus grands, la mobilisaient moins. « Dans ma vie, constate-t-elle, j’ai eu de la chance : tout est toujours bien tombé ».
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Pourtant, quitter le terrain la chagrinait un peu (ce qu’elle adore le plus, ce sont les animations avec les petits de 3è maternelle…). « C’était un autre métier, d’autres défis… » : ceux du management d’une équipe, sans oublier d’endosser le statut de « public relation » avec l’extérieur et d’assurer la promotion de son service, etc.
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Après dix ans, on lui a proposé la présidence du CPAS de sa commune. Elle a alors opté pour un mi-temps et donc l’exercice de deux carrières en parallèle : au SPSE, elle a partagé ses tâches avec le Dr Valérie Hanozet, du côté de son mandat politique, elle a porté une attention particulière aux plus précarisés et aux femmes victimes de violence.
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Elle est, elle a été, « une médecin scolaire heureuse ». Et elle n’en démord pas : si on s’y prend bien, en étant proche des populations visées, il y a vraiment moyen de faire de la prévention, d’aider les jeunes pour leur vie future et d’avoir une pratique valorisante (lire l’encadré ci-dessous). Cette vision ne l’empêche pas d’admettre que sa fin de carrière a été quelque peu « gâchée » par la pandémie. « Les services ont été malmenés (mais pas par l’ONE) », constate-t-elle. Elle craint que le fait d’avoir détourné les services de leurs missions en les réduisant à faire du tracing n’entraine une série de pots cassés qui seront payés un jour. Au prix fort.
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Fabienne Henry, actrice, aurait-elle été heureuse et reconnue ? On ne le saura jamais. Mais pour le Dr Henry, ex-médecin responsable du SPSE de la ville de Bruxelles, aucun doute : on applaudit.
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Morceaux choisis (et héritage ?)
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Pour alimenter réflexions ou discussions, voici quelques-unes des déclarations du Dr Fabienne Henry.
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Sur la profession de médecin scolaire :
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- « Ce n’est pas un métier avec une grande visibilité. Mais la façon de s’y investir fait la différence. Si on le pratique du bout des doigts, c’est une perte de temps pour soi. Si on s’y investit, quels bénéfices ! On peut y avoir le statut de fonctionnaires, mais ce n’est pas pour cela qu’on dépose le Bic à 4 H ! On preste des quantités d’heures que l’on ne rattrapera pas… La crise du Covid l’a bien montré à nouveau. »
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- « L’image de la médecine scolaire change dans la population, et la vaccination y est pour beaucoup, avec cet acte qui permet d’éviter d’aller le faire ailleurs. Au fil du temps, cela améliore notre image. »
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- « Un PO qui soutient et qui soutient même beaucoup – c’est ce que j’ai connu toute ma carrière – c’est vraiment important. J’avais sa confiance et il avait la mienne. Sur le terrain, la présence des inspecteurs pédagogiques instauré par le PO a également été d’une grande aide. Nous pouvions participer aux réunions organisées avec les directions et ainsi améliorer encore la collaboration. Cela a été le cas, par exemple pour convaincre de l’intérêt de nous adresser les carnets de santé des enfants de maternelle. Et les carnets sont arrivés. »
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- « Nous avons fait de gros progrès dans la rédaction de nos conclusions, dans la manière d’envoyer des messages positifs (et moins ésotériques !) : ces efforts pour être proches de nos publics ont un impact. »
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- « Quand on dépiste une pathologie, parfois lourde, chez un enfant, et quand les parents disent merci, cela fait chaud au cœur et cela nous encourage. »
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Sur le statut de médecin responsable d’un SPSE :
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- « Le management d’une équipe n’est pas le plus compliqué parce qu’aller vers les gens, les écouter, les comprendre, expliquer ce qu’on fait, avec des contacts humains, ce n’est pas un problème. Evidemment, des conflits de personne à personne peuvent toujours exister. Cela dit, j’ai toujours travaillé avec des personnes impliquées et j’ai rarement dû dire à quelqu’un : ‘Mais qu’est-ce que tu fais là ?’ »
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Sur la promotion de la santé :
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- « Entre mes débuts et maintenant, il y a eu d’énormes changements. La Promotion de la santé n’a pas changé uniquement la façon de faire des animations. Elle est entrée dans nos bilans de santé et dans nos visites. Nous restons des médecins attentifs à la santé, mais nous l’abordons autrement. Les microbes ne comptent plus en premier lieu : le bien-être fait partie de nos préoccupations, et je crois que c’est le cas dans une majorité des services. Le métier s’est enrichi. »
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- « C’est dans l’esprit de la promotion de la santé que d’inciter les parents à être partie prenante de la santé de leur enfant. »
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- « Nous associer à l’ONE était le choix le plus logique et le plus raisonnable qui pouvait être fait : l’ONE assure la prévention des enfants en bas-âge, nous poursuivons ce travail. Malgré quelques difficultés, cette réunion a été plutôt positive pour nous. Je suis optimiste, les SPSE sont en train de faire leur place au sein de l’énorme structure qu’est l’ONE. Nous avons atterri où nous devions être et nous y trouvons des interlocuteurs qui s’investissent. »
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Sur les problèmes en attente, ou ce qu’il reste à faire :
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- « Lors du nouveau décret, on a raté l’occasion d’introduire des précisions au recueil standardisé. Plus tard, en enregistrant vaccin, vue, taille et poids, on a juste pu ‘prouver’ que les jeunes grossissaient – ce que l’on savait déjà ! Il nous manque un travail de fond autour de la question : qu’est-il intéressant de chercher ? »
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- « Malgré des progrès, le financement des services reste problématique puisqu’il entraîne une pénurie au niveau des recrutements. En permettant d’engager davantage, un meilleur financement donnerait la possibilité de consacrer plus de temps aux enfants, par exemple lors des bilans de santé, en voyant une demi-classe par matinée plutôt qu’une entière et donc en s’engageant encore davantage pour pratiquer à fond notre métier. »
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- « Si j’avais une baguette magique, je la consacrerais au refinancement, à créer un service universel dédié à la santé des jeunes et peut-être, aussi, à l’informatisation des services, avec l’espoir d’aller vers un dossier unique pour chaque enfant… »
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PROJETS - Depuis le temps qu’on y pense… Depuis le temps que tout le monde s’en plaint… Depuis le temps qu’il le faudrait… Pour les écoles secondaires qui savent que leurs toilettes mériteraient un bon coup de neuf, le Fonds Byx a lancé un nouvel appel à projet (à déposer le 19/04 au plus tard). Les résultats de la sélection seront annoncés avant la fin du mois de juin. Pour en savoir davantage sur ce thème et, déjà, trouver une foule de pistes, de conseils ou de témoignages, il suffit d’un détour sur le site : www.netournonspasautourdupot.be
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JEUNES ET SANTE MENTALE - Une étude menée par la Mutualité chrétienne a mis en évidence les fortes conséquences psychiques ou psychologiques que la pandémie a eu sur ses membres de moins de 18 ans. En raison du confinement et des mesures liées à la crise sanitaire, au cours des 2è et 3è trimestre de 2020 et par rapport aux mêmes périodes des années précédentes, on a assisté à une baisse frappante du nombre des consultations en psychiatrie. L’instauration du remboursement des téléconsultations n’a pas permis de combler cet écart important, entraînant une pénurie de soins. Quant aux hospitalisations en psychiatrie, elles avaient, elles-aussi, diminué au cours de ces deux trimestres.
Retour prévisible du bâton ? En tout cas, au début de 2021, beaucoup plus de jeunes souffrant de problèmes de santé mentale ont été hospitalisés : un niveau record de nombre de lits occupés a été observé dans les institutions psychiatriques ou dans les services de psychiatrie des hôpitaux généraux. Ce résultat peut s’expliquer à la fois par les carences et les retards de prise en charge lors de l’année précédente, et par un besoin accru de soins lié à la crise sanitaire.
Outre des chiffres interpelant concernant les augmentations de prescriptions médicamenteuses destinées aux jeunes concernés par des troubles mentaux, l’étude relève également le fait que les conséquences de la pandémie ont été plus sévères pour les jeunes issus de milieux socio-économiques défavorisés.
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Décrochage scolaire
D’après l’étude de la littérature réalisée par le Dr Claire Langhoor dans le cadre de son TFE, il semble que des facteurs de protection puissent être activés au sein de l’école/ des classes pour prévenir le décrochage scolaire : les jeunes semblent davantage protégés lorsqu’on leur confie des responsabilités adaptées à leur âge, qu’ils appartiennent à un groupe de pairs ou ont développé une relation de qualité avec les enseignants et les parents.
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Comment les acteurs PSE peuvent-ils soutenir une relation de qualité entre enseignants et enfants/jeunes ?
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Pour agir avec des groupes, en santé scolaire, il existe des outils qui ouvrent des espaces de parole afin d’exercer et de développer l’expression, l’écoute, l’échange, la communication, le lien.
Les outils présentés ci-après pourraient vous soutenir pour travailler cette thématique avec les groupes ou pour les référer aux enseignants.
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Pour être informés des nouveaux outils et des nouveaux avis de PIPSa, cliquez ci-dessous.
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Nuit Bleue
Parce que le temps passé sur les écrans affecte directement le sommeil…et représente donc un facteur potentiel de décrochage scolaire.
Un DVD et son Cahier d'animation sur le thème de l'hyperconnectivité et du sommeil des jeunes.
Public : de 12 à 18 ans
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Le village
Le Village est un outil de prévention du harcèlement scolaire et plus globalement, une manière de mieux réguler les difficultés relationnelles dans un groupe d’enfants.
Public : à partir de 8-12 ans
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Apprentie girafe
Jeux de cartes conçus pour identifier nos émotions et nos ressentis, nos besoins et ceux de nos proches. Une manière ludique et visuelle de mieux se connaitre, s’accueillir, se rencontrer.
Une pratique intégrée de la CNV facilitera l’utilisation de l’outil.
Public : 8-12 ans
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Mille et une valeurs
Jeu de cartes pour aborder les valeurs et permettre une meilleure compréhension et acceptation de soi et des autres.
Alors qu’elles fondent nombre de nos comportements et choix au quotidien, les valeurs restent souvent implicites voire inconscientes.
Voici un outil pour en prendre conscience et les exprimer aux autres.
Public : à partir de 12 ans, intéressant aussi pour les équipes éducatives.
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Vous avez utilisé un outil ? Qu’en pensez-vous ?
Qu’en avez-vous pensé ? Était-il adapté à votre groupe ? Quels aménagements avez-vous dû réaliser ?
Votre avis peut intéresser des collègues !
Sur www.pipsa.be, entrez le nom de l’outil que vous avez utilisé, onglet « avis des utilisateurs » et laissez un commentaire.
Les futurs utilisateurs vous remercient ! :-)
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Vous souhaitez aborder des thématiques particulières ? Vous travaillez avec des publics spécifiques ? Vous souhaiteriez être orienté.e.s dans le choix d'outils intéressants ?
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