101Alimentation
25.09.2025

Promouvoir une bonne alimentation à l’école, dans ses nombreuses facettes

L’acte de manger est influencé par de nombreux facteurs (socio-culturel, économique, organisationnel, …). Cette vision globale de l’alimentation est à prendre en compte si l’on souhaite encourager une meilleure qualité de vie pour tous et lutter contre les inégalités sociales de santé. Dans ce contexte, quel rôle l’école peut-elle jouer ?

En cette rentrée 2025, l’ONE diffuse une mise à jour des objectifs prioritaires de l’alimentation chez l’enfant (OPA) (voir article 1 de notre dossier). Ces nouveaux objectifs mettent davantage l’accent sur le contexte des repas, pour promouvoir un environnement sain et bienveillant autour de l’alimentation des enfants.

Ceci rencontre la tendance actuelle d’une certaine prise de conscience pour travailler les environnements scolaires et le bien-être des enfants à l’école. En matière d’environnement alimentaire aussi, des initiatives favorables se développent petit à petit au sein des écoles. Initiatives que les travailleurs et travailleuses des services PSE peuvent encourager lors de leurs visites d’établissements notamment.

Avec Nathalie Claes et Cleo Rotunno, conseillères en diététique à l’ONE, nous avons passé en revue quelques éléments saillants.

La qualité des collations et des repas

Nathalie Claes : « De manière générale, la qualité des repas proposés à l’école a bien évolué. Il y a une prise de conscience. Beaucoup d’écoles collaborent autour de projets d’alimentation durable, avec Good Food, Manger Demain, etc. Mais cela reste toujours une démarche volontaire de l’établissement, qui pourrait être davantage encouragée et accompagnée. »

On pense par exemple à la difficile question des collations, et notamment celle de 10 heures. Un systématisme. Presqu’une institution dans les écoles belges francophones ! Cette collation n’est pourtant pas indispensable si l’enfant a pris un bon petit-déjeuner, comme l’explique Nathalie Claes : « L’idéal serait que cette collation soit individualisée et qu’elle complète ce que l’enfant n’a pas consommé au petit-déjeuner. Ça, c’est vraiment le principe de base. Evidemment, dans la pratique, on sait que c’est compliqué à mettre en place en collectivité.
Mais un enfant qui a suffisamment déjeuné juste avant le début de la classe n’aura peut-être pas faim à 10 heures et risque de manger par automatisme. C’est important aussi de pouvoir faire confiance à l’enfant et, dans la mesure du possible, le laisser gérer les quantités qu’il mange. »

« Certaines problématiques spécifiques mises à part, dans la globalité, les enfants se portent bien et donc c’est important de favoriser l’autonomie de l’enfant dans un cadre bienveillant. »

La qualité des collations apportées par les enfants est un autre point d’attention sur lequel les écoles tentent d’agir au moyen de diverses initiatives : interdire certains aliments à l’école, imposer le type de collation (fruit, produit laitier, fruits secs…) en fonction du jour de la semaine, organiser des collations groupées fournies par les parents ou même par l’école… Ces démarches peuvent être porteuses, et sont à privilégier au cas par cas en fonction du contexte de l’école. (A ce sujet, voir aussi l’article 3 de notre dossier : Cassons les codes de la boîte à tartines.)

Et la qualité du temps de repas

Enfin, la qualité du temps de repas mérite aussi une certaine attention. Cleo Rotunno : « l’environnement, l’ambiance du local dans lequel on mange vont aussi avoir un impact sur le bien-être autour du temps de repas. Par exemple, certains réfectoires sont très bruyants, ou trop petits. Les enfants mangent alors dans leur classe ou doivent terminer leur repas en 20 minutes pour laisser la place aux autres. Cela ne favorise pas un temps de repas agréable.
N’oublions pas qu’entre 2 et 12 ans, les enfants sont encore en plein développement de leur goût, du fait de manger en collectivité et d’avoir des repas en dehors du cadre familial. Cela vaut la peine de pouvoir les accompagner le mieux possible dans cet apprentissage. »

L’environnement comme porte d’entrée ?

Limiter le gaspillage alimentaire, réduire les poubelles… en parallèle à la notion de santé, les aspects environnementaux ou économiques constituent parfois une porte d’entrée vers une alimentation plus saine et durable à l’école, pour les pouvoirs organisateurs mais aussi pour les parents et les élèves eux-mêmes.

Par exemple, l’étude Drink – Buvons autrement !, menée sur deux ans par l’École de Santé Publique de l’ULB dans près de 50 écoles primaires francophones à partir de mai 2021, visait à réduire la consommation de boissons sucrées tout en augmentant celle d’eau du robinet chez les élèves de 3e à 5e primaire. Trois types de leviers ont été testés — nutrition, durabilité, ou les deux combinés — avec un quatrième groupe servant de témoin. Les premières analyses suggèrent que la combinaison des messages nutritionnels et environnementaux potentialise les effets de l’action sur le comportement des enfants, davantage que chacun présenté seul. Ceci confirmerait l’hypothèse des chercheurs, selon laquelle la sensibilité à ces arguments varie selon les familles.
Plus d’infos : lire l’article de mangerbouger.be.

Deux ressources pour aborder la question de l’environnement à l’école :

Bruxelles Environnement propose l’Opération Recyclons Light : bénéficiez d’un accompagnement et de formations pour réussir votre sensibilisation au tri, et améliorer la gestion des déchets dans votre école. Inscriptions possibles jusqu’au 5 octobre 2025.
Plus d’infos sur le site de Bruxelles Environnement.

Les GoodPlanet Challenges, ce sont six défis répartis sur l’année scolaire. Chaque défi se concentre sur un thème environnemental. Vous pouvez choisir les challenges que vous souhaitez relever. Parmi ceux-ci, le challenge Zéro déchet vise à réduire les emballages, le plastique et le gaspillage alimentaire.
Plus d’infos sur le site de Good Planet

L’éveil au goût et l’alimentation comme matière scolaire, mais le plaisir avant tout !

Comme le souligne Cleo Rotunno, « les comportements alimentaires qu’on essaie de proposer aux enfants dès le plus jeune âge, vont avoir un impact tout au long de la vie. Au plus tôt on les accompagne avec un rapport bienveillant à l’alimentation – les laisser expérimenter, goûter, toucher, et ne pas manger aussi – au plus l’impact sera positif sur la suite. Tant pour la prévention surpoids, qu’en favorisant un rapport sain à l’alimentation. Il y a énormément de choses qui se jouent dès le plus jeune âge. »

Cela signifie notamment développer le plaisir à manger de tout, équilibré. « Quand on parle de plaisir, complète Cleo Rotunno, on entend le plaisir gustatif, sensoriel, mais aussi ce que l’on appelle le plaisir cognitif. C’est-à-dire construire son apprentissage des aliments : toucher la fraise pour constater qu’elle est rugueuse, apprendre que le lait vient du pis de la vache et pas d’un carton, que les spaghettis sont fabriqués avec du blé.

Apprendre à bien manger, c’est d’abord développer le plaisir de connaître le monde alimentaire qui nous entoure. En manipulant, en goûtant, en faisant de la soupe en classe… Plus tard, quand l’enfant sera plus grand, on pourra venir avec les notions d’alimentation et d’équilibre alimentaire. Personnellement, j’ai souvent le sentiment que cela arrive trop tôt. L’enfant ne va alors pas faire le lien avec son bien-être, son plaisir, etc. Il existe de nombreuses activités ludiques qui permettent de s’éloigner un peu de la théorie de l’équilibre alimentaire qui, elle, peut s’avérer stigmatisante ou susciter du stress.

Souvenons-nous que les enfants n’ont pas ou très peu de pouvoir décisionnel sur ce qu’ils mangent. C’est donc important de ne pas se limiter à un aspect purement nutrition, calories… Contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce n’est pas ce que nous, diététiciennes, nous encourageons. »

Communiquer avec les parents

Le chemin vers une alimentation plus saine et durable à la cantine est quelque-chose qui se prépare et se travaille avec les enfants, avec les enseignants et les éducateurs, mais aussi avec les familles.

« N’oublions pas qu’un parent qui met son enfant à la cantine, c’est dans le but de se faciliter la vie, explique Nathalie Claes. Souvent, c’est une garantie que son enfant a bien mangé à midi et que le repas du soir peut être plus simple. Alors si l’enfant n’a pas mangé à la cantine parce que c’était un aliment qu’il ne connaissait pas, des légumineuses au lieu de la saucisse par exemple, les parents ne seront pas satisfaits. Cela créera des inquiétudes, même si l’intention de départ était bonne : proposer une meilleure alimentation aux enfants. »

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