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05.03.2025

Tabac : nouvelle loi, nouveaux projets pour les écoles

Depuis le 31 décembre 2024, de nouveaux espaces sont visés par une interdiction de fumer. La récente modification de la loi instaure notamment un périmètre sans fumée aux abords de certaines institutions comme les écoles, dans une logique de dénormalisation du tabagisme. A Morlanwelz, la commune et l’école fondamentale Roosevelt n’ont pas attendu janvier pour se saisir de la question.

Enfants joyeux à la sortie de l'école

Commençons par le cadre légal. Les nouveaux périmètres sans fumée s’inscrivent dans la modification de la loi du 22/12/2009 relative à l’interdiction de fumer dans certains lieux et à la protection de la population (voir encadré), entrée en vigueur le 1er janvier 2025. Cette mesure cadre avec les objectifs de la Stratégie interfédérale 22-28 pour une Génération sans Tabac.

En route vers une Génération sans Tabac

Les chiffres sont interpellants. En Belgique, 1 personne sur 4 fume. 4 fumeurs sur 5 auraient commencé avant l’âge de 25 ans, et 1 fumeur sur 5 a commencé avant ses 15 ans. D’où l’importance de sensibiliser suffisamment tôt à cette problématique.

Le mouvement Générations sans Tabac aspire à une société où plus personne ne souffre ou ne décède des conséquences du tabagisme, y compris passif. Ce mouvement est une initiative de l’Alliance pour une Société sans Tabac, soutenu par de nombreuses organisations de santé, associations médicales, communes et entreprises.

Chiffres sur le tabagisme
Source : présentation du webinaire de décembre (voir encadré)

Affiche Generations Sans Tabac« Générations sans Tabac encourage une logique de dénormalisation du comportement, en partant du principe que voir fumer incite à fumer », explique Manon Willem, responsable du projet « Si l’on s’abstient de fumer devant les enfants et si ne pas fumer devient la norme dans notre société, les enfants et les jeunes seront mieux armés pour dire non à la cigarette. En parallèle, il est nécessaire de soutenir efficacement les fumeurs qui souhaitent arrêter.

Générations sans Tabac cherche à atteindre cet objectif en instaurant des espaces sans tabac fréquentés par les enfants, tels que les écoles, les aires de jeux et les hôpitaux, et en y installant du matériel de signalisation. »

Les nouveaux espaces sans tabac

Les nouveaux lieux où l’interdiction de fumer est totale sont : les parcs d’attraction, les parcs animaliers, les fermes pédagogiques pour enfants et les plaines de jeux. Cette interdiction couvre aussi les terrains de sport (à l’exception des terrasses Horeca à proximité).

Sont également visés : les centres de soins, de court séjour, les maisons de repos et de soins, les bibliothèques publiques, les hôpitaux, les crèches et les établissements d’enseignement, pour lesquels il est prévu des zones sans tabac dans un périmètre de 10 mètres aux entrées et sorties de ces établissements. Les services PSE ne sont pas visés par cette obligation, mais peuvent appliquer ce périmètre sans fumée si cela semble opportun.

Tous les produits à base de tabac sont concernés, ainsi que les produits similaires comme la e-cigarette.

Pour plus d’informations sur la mise en pratique de cette nouvelle loi, vous pouvez consulter les FAQ sur le site du SPF Santé publique ou visionner en replay les webinaires organisés en décembre par l’AVIQ, en collaboration avec le SPF Santé publique, Générations sans Tabac, le FARES et la Fondation contre le Cancer :

Ensemble vers un nouveau souffle : du soutien pour aborder le tabagisme

Organisée par le Plan wallon sans tabac autour du 31 mai, Journée mondiale sans tabac, la campagne Ensemble vers un nouveau souffle aborde la prévention et la gestion du tabagisme au sens large, dans une perspective positive, encourageante et non-jugeante. Vous souhaitez vous impliquer dans la prévention et la gestion du tabagisme ? Retrouvez sur le site des infos pour vous former, obtenir du soutien pour mettre en place une action, et du matériel de communication. Vous pouvez également contacter les organisateurs à : info@evuns.be.

Morlanwelz, un bel exemple de projet participatif

A Morlanwelz, sur l’impulsion de Mr Alev, précédent échevin de la santé et avec le soutien de Mme Tasca qui lui a succédé, un projet a été monté à l’école fondamentale communale F. Roosevelt afin d’intégrer ce changement de législation de la façon la plus parlante possible pour les élèves et les parents. L’école a pour cela sollicité l’aide du Fonds des Affections Respiratoires (FARES) dès le mois d’octobre dernier. En ce début d’année, un groupe de travail a réuni les différents acteurs impliqués (FARES, direction, enseignantes, professionnels du CPMS et SPSE).

Cédric Migard, chargé de projet au FARES : « nous avons proposé à l’école de mettre sur pied un projet global de sensibilisation de tous les acteurs, intégrant toute la complexité et les dimensions de la thématique tabac (santé, aide à l’arrêt, vie collective et aménagement des espaces, environnement…), avec la vision la plus large et la plus nuancée possible. C’est pourquoi il nous paraissait aussi intéressant d’inviter le service PSE et le centre PMS à collaborer au projet. Nous avons été très heureux de constater l’enthousiasme de tous : PSE, enseignants, élèves… même la RTBF a relayé le projet ! »

Cette réflexion collective a débouché sur une coanimation par le SPSE, le FARES et les enseignantes titulaires des deux classes de 6ème primaire. Valérie Diependaele, Infirmière coordinatrice du PSE de Morlanwelz : « L’objectif de l’animation était de développer l’esprit critique des élèves par rapport au tabagisme et de travailler les compétences psychosociales en renforçant les comportements positifs. Il fallait que l’animation parle à tous les enfants, même ceux qui ont peu de contact avec le tabagisme dans leur quotidien, ce qui était un défi. Nous nous sommes appuyés sur un support de photolangage et sur le jeu ‘Parcours sans T’ du FARES, légèrement adapté afin que les questions correspondent à des élèves de cet âge. Cette animation a été bien accueillie par les élèves, qui étaient très impliqués. »

Ce travail est par ailleurs soutenu par les enseignants, qui ont déjà travaillé le sujet en amont avec leur classe et ont proposé des idées, comme utiliser le journal de l’école. Une fois bien informés sur la problématique du tabac, les enfants pourront prendre un rôle actif dans la communication. En effet, des panneaux vont être réalisés à partir de dessins d’élèves et placés aux abords de l’école afin de sensibiliser à l’interdiction de fumer. Les élèves vont également réaliser de petites vidéos d’information. « Impliquer activement des élèves dans la communication permettra aussi de maximiser l’adhésion aux messages, souligne Cédric Migard. Maintenant, le projet est sur les rails et est porté par les acteurs de l’école. Bien sûr, ils peuvent toujours solliciter le FARES s’ils ont encore besoin de soutien. »

Enfin, un moment d’évaluation du projet est prévu. « Par la suite, complète Valérie Diependaele, on pourrait imaginer que le projet soit transposé à d’autres écoles. Le PSE a également un rôle à jouer pour l’encourager. »

L’avis de l’ONE : quel rôle pour les PSE dans la prévention tabac ?

D’après Anne Naudin, conseillère Santé publique pour Pôle Promotion de la Santé à l’Ecole de l’ONE : « Les services PSE ont un rôle à jouer pour encourager la réduction du tabagisme et soutenir les élèves qui expérimentent la cigarette ou deviennent fumeurs réguliers.

Il s’agit d’une part d’éveiller l’intérêt des directions sur la question du tabac et d’échanger avec le personnel éducatif, de faire connaître le matériel d’affichage existant – notamment celui de Générations sans Tabac – et d’encourager les projets visant à soutenir l’implémentation des politiques d’écoles sans fumée.

De par sa relation privilégiée avec l’école, le service PSE peut discuter avec la direction sur la situation tabagique de son école (un nombre élevé de fumeurs, une augmentation de la consommation de produits dérivés du tabac…) et l’encourager à faire appel aux services qui proposent des accompagnements sur ces thématiques (comme le SEPT, le FARES… Le mouvement Générations sans Tabac est aussi un des acteurs du champ de la prévention soutenant les professionnels). Si le service ou le centre a la possibilité temporelle et humaine de proposer une collaboration telle que celle du PSE de Morlanwelz, pourquoi pas ?

Sur le plan individuel, le PSE a aussi un rôle à jouer. Celui du professionnel RELAIS qui a pour objectif de mettre à disposition des élèves, une information claire et correcte à ce sujet. Cela passe par l’utilisation des flyers, brochures, jeux… réalisés par des spécialistes tels que le FARES, l’Observatoire de la Santé du Hainaut, Générations sans tabac, le Plan wallon sans tabac dans le cadre de la campagne Ensemble vers un nouveau souffle, …

Ces informations doivent être disponibles au sein du service ou du centre, à des endroits accessibles aux élèves et ce, dès la fin du primaire. Les premières expérimentations débutant parfois déjà à l’âge de 10 ans, comme le montre l’enquête HBSC 2022.

De même, il est capital que le PSE puisse donner des coordonnées de contacts d’aide au sevrage tabagique à tout élève demandeur. Il en va de notre capacité à développer un réseau pertinent pour l’action, ainsi qu’à soutenir la réelle capacité d’agir des élèves. »

A Huy, on parle tabac lors des bilans de santé

L’antenne de Huy du service PSE Provincial de Liège mène plusieurs initiatives d’information relative au tabagisme au sens large (cigarette, cigarette électronique, chicha, cannabis, etc.) lors des bilans de santé. Aurélie Londot, diplômée en santé publique et une des cinq infirmières du PSE de Huy : « Durant le temps d’attente, nous distribuons à nos élèves de l’enseignement secondaire et supérieur un questionnaire individuel sur les habitudes de vie en relation avec la santé. Celui-ci comprend des questions sur le tabagisme. C’est un outil très utile. Ensuite, le dialogue mené au cabinet médical avec le médecin et éventuellement une infirmière, permet d’en savoir davantage sur les habitudes du jeune. Généralement, c’est le médecin, Christine Delvenne, formée par le FARES à l’entretien motivationnel, qui lui demande s’il souhaite être davantage informé. »

Le cas échéant, une information personnalisée est délivrée au moyen des supports suivants :

« Une partie de l’équipe de l’antenne a pu prendre part à une séance d’information organisée par le FARES dans les locaux du CLPS. Nous avons le souhait de pouvoir enrichir nos connaissances au moyen de formations abordant, notamment, les nouveaux modes de consommation chez les jeunes tels que la puff. »

Les recommandations de l’ONE pour améliorer la gestion du tabagisme à l’école : quelles actions utiles auprès des élèves, des directions, des partenaires ?

  • Enfants qui sortent de l'écoleInformer/sensibiliser/rappeler aux directions d’écoles le « périmètre sans fumée », par exemple lors de la visite d’établissement.
  • Fournir aux directions des écoles qui connaissent un taux élevé de fumeurs réguliers le lien pour le webinaire de l’AVIQ et le PowerPoint correspondant. Fournir une information claire sur les accompagnements « projets » proposés par le FARES et le SEPT.
  • Mettre à disposition des élèves une information claire sur la consommation de tabac et ses conséquences, en salle d’attente par exemple. Si nécessaire, déterminer un groupe d’élèves à qui sont destinées prioritairement ces informations en s’appuyant sur les résultats des enquêtes HBSC.
  • Fournir aux élèves fumeurs réguliers une information claire sur l’aide au sevrage et transmettre des coordonnées locales où trouver du soutien (lors des bilans de santé, des rencontres informelles…). Pour cela, il est nécessaire de prendre connaissance de l’offre existante sur le territoire de l’école et d’initier des contacts (ou améliorer/activer son réseau). Le service Tabacstop peut également être une ressource intéressante.
  • Être attentifs aux nouveaux produits mis sur le marché.
  • Réfléchir à l’identification du service PSE et du centre PMS-WBE comme « lieu de travail sans tabac ». Générations sans Tabac propose également du matériel à cet effet.
  • Diffuser au sein du service une information claire sur les ressources existantes en matière de sevrage tabagique pour les adultes du PSE.

Ces activités pourraient nourrir un objectif de promotion à la santé en ce compris la prévention dans le projet de service.

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