Accès aux soinsDonnées scientifiquesNuméro
10.09.2025
Numero: 23

Une étape supplémentaire dans la mise en place du PSSI

Le 19 juin dernier, le Centre de recherche de Bruxelles sur les inégalités sociales (CREBIS) a organisé son premier webinaire intitulé « Ce qu’on devrait toutes et tous avoir à portée de main ». Derrière ce titre, il s’agissait pour le centre de présenter le rapport de recherche sur l’accompagnement à la mise en place du Plan Social-Santé Intégré (PSSI), réalisé par Karine Boussart, Valentina Marziali et Jacques Moriau, chercheurs au Crebis. Rappel des bases du PSSI et présentation des résultats.

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Lancé en octobre 2022 par le cabinet du ministre des Affaires sociales et de la Santé, Alain Maron, après le constat d’une détérioration du bien-être social, physique et mental des Bruxellois, le PSSI a pour objectif de contrer cette détérioration en proposant un modèle renouvelé de l’offre d’aide et de soins fondé sur la territorialisation et l’organisation intégrée des services socio-sanitaires. Le plan a notamment introduit deux nouvelles échelles territoriales en complément des niveaux communal et régional : les quartiers social-santé (56, comptant en moyenne 25.000 habitants) et les bassins social-santé (5, comptant en moyenne 250.000 habitants).

La recherche menée par le Crebis d’avril 2024 à mars 2025[1] visait à définir ce que l’offre de base en matière de services socio-sanitaires devrait représenter en étudiant les besoins, les demandes exprimées et l’offre disponible. Comment améliorer l’accès et la continuité de l’aide et des soins ? Pour y répondre, l’idée générale était de dire qu’il est possible de mieux coordonner les acteurs si un terrain d’action commun est défini. La territorialisation vise ainsi à adapter l’offre de services aux réalités locales, afin de rapprocher les soins et l’aide sociale des populations concernées. Cela répond, entre autres, à la nécessité de prendre en compte les différences socio-sanitaires entre territoires. L’universalisme proportionné vise, quant à lui, à « offrir des interventions universelles destinées à l’ensemble des personnes, mais avec des modalités ou une intensité qui varient selon les besoins »[2]. Autre concept important au cœur du PSSI, la programmation qui consiste à définir une offre de services en fonction des besoins identifiés sur un territoire donné.

Trois quartiers explorés

La recherche s’est ainsi focalisée sur trois quartiers aux profils différents, d’un point de vue géographique, démographique, socio-économique et sanitaire : les Marolles, un quartier au centre de Bruxelles ; Koekelberg, un quartier social-santé au nord de la Région qui correspond au territoire de la commune (Koekelberg) et Evere Sud, un quartier à l’est de Bruxelles.

Dans les Marolles, on observe généralement des revenus faibles, une stabilité démographique, une proportion importante de la population issue de l’immigration, une répartition dans la moyenne bruxelloise en termes d’âge, une offre social-santé dense et la présence d’un hôpital public.

A Koekelberg, deux réalités se côtoient en matière d’indices socio-économiques et de profil démographique, présentant une stabilité de la population avec une composante immigrée dans la moyenne régionale. On y note aussi une part des 0_17 ans, relativement plus importante que la moyenne régionale.

A Evere Sud, on remarque une croissance de population de plus de 10% et une offre proportionnellement faible en matière social-santé, ainsi qu’une part relativement élevée de personnes de plus de 65 ans.

Quels besoins dans quels quartiers ?

Avoir des profils de quartiers contrastés dans l’étude était important pour proposer une offre de base en matière de services socio-sanitaires qui pourrait a priori répondre à l’entièreté des besoins exprimés dans les 56 quartiers social-santé bruxellois. Quels sont les besoins essentiels exprimés ? En plus des sources consultées[3], les chercheurs se sont également entretenus avec les professionnels du social-santé des trois quartiers sélectionnés.

A Evere Sud, les professionnels ont pointé plusieurs problématiques et besoins du quartier comme : un vrai manque au niveau du suivi psychologique, en pédopsychologie et psychiatrie, un manque de services qui puissent aider à la recherche d’un logement, un manque de médecins généralistes qui se rendent à domicile et qui ont le temps de faire des suivis et de créer un lien de confiance avec leurs patients (notamment dans le cas des personnes âgées).

A Koekelberg, les chercheurs sont partis des difficultés et besoins qui avaient été relevés par les participants lors du diagnostic réalisé dans le cadre du Contrat Local Social Santé (CLSS)[4], un dispositif particulier reconnu dans le cadre de la mise en place du PSSI. Comme à Evere Sud, les services de santé mentale sont insuffisants, avec une forte demande, des psychologues souvent saturés et de longues listes d’attente. Ont aussi été pointés : des démarches administratives complexes, des retards scolaires et des inégalités éducatives[5], un manque de soutien et d’information pour les familles et les citoyens vulnérables…

Enfin, contrairement aux deux autres quartiers sélectionnés, le quartier des Marolles dispose d’un tissu associatif dense, mais qui ne suffit pas pour prendre en charge tous les publics. Seuls quelques services proposent un accueil bas seuil et ces derniers n’arrivent pas à supporter toute la charge et la complexité des situations. Comme difficultés recensées, les professionnels ont mentionné : la délinquance de plus en plus précoce (dès 10 ans), des faits de violence intrafamiliale, le manque de réseau et l’isolement lié à un passé migratoire qui déracine et une situation de précarité où la honte empêche de sortir ou demander de l’aide. 

L’ « esquisse » d’un modèle pour l’offre de base

L’offre de base vise tout d’abord à proposer des fonctions social-santé dont les habitants ont régulièrement besoin, du moins celles auxquelles ils devraient fréquemment faire appel. Ces fonctions portent une attention particulière à l’accessibilité pour toutes et tous sans discrimination, mais aussi pour les plus précaires. Dans l’offre de base, la notion de « bas seuil » est un élément fondamental. L’offre elle-même comprendrait des fonctions généralistes, non connotées et non stigmatisantes, fortement coordonnées, et des services spécialisés. L’ensemble des fonctions reflète une pluridisciplinarité et une variété, tant au niveau des métiers que des approches.

Les fonctions de lien ou les relations entre acteurs jouent également un rôle crucial dans la mise en place de l’offre de base et dans la construction d’une responsabilité vis-à-vis de la population locale. Les chercheurs ont schématisé le modèle de l’offre de base (disponible dans la note de synthèse[6]).

Enfin le rapport contient également des recommandations, tant au niveau des étapes à suivre que sur la gouvernance.

Anoutcha Lualaba Lekede

Pour aller plus loin et retrouver l’analyse des quartiers :

Boussart K., Marziali, V., Moriau J., Rapport de recherche – Accompagnement à la mise en place du PSSI – Etude pilote sur l’offre de base, CBCS/Crebis, mars 2025, 128 p. – pour la consulter : https://www.crebis.be/nos-recherches.

Revoir le webinaire :

https://www.youtube.com/watch?app=desktop&v=w3gn97DOIXA&t=2s&pp=2AECkAIB.

 


[1] Boussart, K., Marziali, V., Moriau J., Note de synthèse du rapport de recherche sur l’accompagnement à la mise en place du PSSI – Etude pilote sur l’offre de base, CBCS/Crebis, 2025, p.1.
[2] Poissant J., Les conditions de succès des actions favorisant le développement global des enfants : état des connaissances. Québec : INSPQ ; 2014. 34 p.
[3] La consultation de la littérature, de différents textes juridiques (la Convention des droits de l’homme, la Constitution…), des publications relatives aux déterminants sociaux de la santé, etc.
[4] Touali I., Diagnostic communautaire CLSS – Contrat Local Social Santé : Quartier Koekelberg, CPAS de Koekelberg, 2024, p.41.
[5] Les environnements domestiques instables, associés à un manque de ressources éducatives adaptées, contribuent à une faible motivation scolaire.
[6] Boussart K., Marziali V., Moriau J., Note de synthèse, ibidem., p.7

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