DossierPrévention
04.06.2025
Numero: 22

Cabane, un projet qui prend soin des parents solos et de leur(s) enfant(s)

Être parent solo implique beaucoup de travail et de charges à assumer seul. C’est pourtant ce que vivent beaucoup d’entre eux parmi les 65.000 parents solos que compte Bruxelles. Comment les aider pour les soulager de tout ce qu’ils doivent porter ? Il existe des initiatives des pouvoirs publics pour les aider, comme le projet Miriam du SPP Intégration sociale, mais celles-ci restent peu nombreuses et ne suffisent pas toujours à alléger les nombreuses taches que ces familles doivent assumer. Des citoyennes y ont réfléchi et créé une association qui offre aux familles monos de véritables bulles d’air. En 2024, la Ligue des familles a repris le projet, en collaboration avec la Maison des Parents Solos et le Petit Vélo Jaune, et l’a rebaptisé Cabane.

Dossier parents solos et de leur(s) enfant(s)

Il y a quelques années, trois citoyennes ont créé l’association Hamac dont le but était de créer des liens durables, enrichissants et structurants entre des familles monoparentales, leurs enfants et des bénévoles – appelés “accompagnant·e·s” –, habitant un même quartier. L’objectif était de donner un peu de temps aux parents solos pour souffler et pour permettre à leurs enfants de tisser de nouveaux liens et vivre de nouvelles expériences aux côtés d’une personne de confiance. Mais les trois citoyennes qui y travaillaient de manière bénévole ont fini par s’épuiser et, au bout de cinq ans, elles ont cherché des repreneurs. C’est ainsi qu’elles se sont tournées vers la Ligue des familles, afin que celle-ci puisse reprendre le projet. La passation entre les deux structures a eu lieu en mars 2024. Le projet a continué à s’appeler Hamac pendant quelques mois avant d’adopter, en décembre 2024, le nom qu’on lui connaît aujourd’hui, Cabane.

Hamac était une invitation au lâcher-prise, au repos, et à prendre du temps pour soi. « Comme un doux balancier sous les arbres, il portait en lui une promesse de bien-être et de sérénité. C’était également l’espace offert à l’enfant pour reprendre son souffle, se recentrer et rêver, soutenu par ses deux piliers : son parent et sa ou son bénévole accompagnant·e.[1] » Avec Cabane, les uns et les autres sont toujours invité·e·s à voyager dans l’univers de l’enfance, de l’aventure et de la découverte. La cabane, explique-t-on à la Ligue, n’est pas seulement un endroit où se poser : c’est un lieu à construire, à imaginer, un refuge qui abrite à la fois nos rêves et nos besoins fondamentaux de sécurité. Cette aventure offerte par son parent et sa ou son bénévole accompagnant·e permet d’explorer de nouveaux horizons, d’échanger ses passions et d’en découvrir d’autres[2]. Avec Cabane, c’est le projet Hamac qui se poursuit à travers la Ligue des familles.

De belles rencontres pour de belles aventures

Cabane est un projet qui veut mettre en relation un·e bénévole qui souhaite consacrer deux heures par semaine à un enfant d’une famille monoparentale, à grandir ensemble et à s’enrichir mutuellement, sur une période d’un an renouvelable. Ce cadre clair offre une structure à la relation, tout en laissant la liberté d’explorer ensemble une variété d’activités adaptées aux passions et envies de l’enfant et de la personne volontaire. L’accompagnement Cabane n’est ni du babysitting, ni de l’aide aux devoirs, mais une occasion pour le duo – appelé “binôme” au sein de la Ligue – de partager ses centres d’intérêts et de partir ensemble à la découverte de son quartier, ainsi que l’un de l’autre.

C’est le cas par exemple de Valentina, son fils David et son accompagnante Nathalie, un des binômes de Cabane[3]. Pour Nathalie, le projet est « une histoire d’être humains qui se reconnectent à leurs vraies valeurs de rencontres et d’êtres humains. Il n’y a rien de plus intéressant dans la vie que les rencontres. C’est un·e volontaire qui s’investit avec les enfants des autres. J’ai moi-même été élevée par d’autres adultes que mes propres parents. Je me suis séparée de mon mari, je sais ce que c’est de vivre seule. Le projet me parle d’autant plus. Pour moi, le plus beau cadeau qu’on peut donner aux gens, c’est du temps, avec un enfant, dans le contexte d’une histoire qu’on va construire ensemble. La relation se construit petit à petit, en confiance et dans le respect, tant pour l’enfant que pour le parent solo. C’est tellement riche… »

Pour Valentina, la maman de David, ces deux heures que passe son fils avec Nathalie représentent beaucoup : « J’ai mes enfants dans la tête 24h/24. Quand David est avec Nathalie, j’ai une longue liste de tout ce que je vais faire et, parfois, je dors car je peux enfin respecter mes propres rythmes et besoins, et pas celui de mes enfants. C’est quelque chose qui n’a pas de prix, ça vient du cœur. On a les mêmes énergies, les mêmes envies ». Ce qui l’a motivée à rejoindre le projet ? Après le Covid, elle était isolée et c’était assez intense chez elle, avec deux enfants en bas âge : « J’avais besoin de soutien, de temps pour moi ». Mais le plus important, souligne-t-elle encore, c’est le fait que son enfant « passe un temps de qualité avec un autre adulte ».

Pour Nathalie, sa motivation était la volonté de créer un lien sur la durée avec un enfant dans un contexte de famille monoparentale, sans pour autant avoir la responsabilité d’une famille d’accueil. « Depuis que je suis maman, je n’ai jamais travaillé le mercredi après-midi pour passer ce temps avec mes filles. Elles ont grandi, j’ai choisi de garder la moitié de ce temps pour moi et l’autre pour un enfant. C’est important pour moi de tisser du lien social dans mon quartier. Puis, être une femme seule, c’est tellement compliqué, il y a beaucoup de choses pour lesquelles on doit se battre. C’est important dans mon schéma de vie d’offrir ce temps de qualité à une personne, maman seule qui vit cela. J’adore la notion de quartier du projet. Avec David, on se voit dans la rue, en chemin pour l’école, au marché, on s’arrête cinq minutes… On s’apporte un soutien mutuel dans les aléas de la vie quotidienne. »

Sur leur relation, Nathalie est intarissable et raconte encore comment ils cuisinent ensemble, partagent les mêmes goûts en matière de loisirs créatifs : « C’est une richesse de pouvoir s’introduire dans son quotidien, dans l’innocence d’un enfant qui a envie d’apprendre. C’est de qualité car c’est toujours un moment choisi et jamais imposé. C’est un moment bien défini que je décide avec sa maman en amont. Il y a toujours dans un coin de ma tête : ‘Le dimanche, c’est pour David !’ Mais on s’organise en fonction, il est déjà venu chez mes parents par exemple. »

Les binômes en quelques mots

Comme l’explique Hélène Bougaud, responsable adjointe du Service animation et intégration sociale de la Ligue des familles, Cabane reste sur les mêmes objectifs, la même philosophie, et la même manière de travailler que le projet Hamac. Il y a ainsi quelques critères pour mettre en relation une famille monoparentale avec un volontaire. « Il y a tout d’abord la distance géographique, parce que nous voulons vraiment que ce soit un volontariat de quartier. Il y a trois kilomètres maximum de distance entre le domicile du volontaire et le domicile de l’enfant, justement pour créer ce sentiment de quartier et savoir qu’on a une personne de confiance qui n’habite pas loin de chez nous. Il y a également la disponibilité dans la semaine pour pouvoir se retrouver au même moment. Et, autre critère important, le volontaire peut indiquer un âge de préférence pour l’enfant qu’il ou elle souhaite accompagner, puisque ce n’est pas la même énergie, ce n’est pas la même relation que l’on a avec un enfant de 3 ans, 6 ans ou 10 ans. »

Transmis par l’association Hamac, le projet a officiellement été relancé par la Ligue des familles en mars 2024. Cabane a donc soufflé cette année sa première bougie. Une année que l’association a mise à profit pour se réapproprier la méthodologie et travailler sur le nouveau nom. Actuellement, dix binômes ont signé une convention. « Nous sommes assez fiers parce que dix binômes, pour une première année, c’est vraiment beaucoup au regard de ce qui se fait au niveau des binômes solidaires, confie Hélène Bougaud. Et aussi parce que c’est vraiment le qualitatif qui compte. Il faut soigner la mise en relation entre les personnes, s’assurer que ça correspond bien pour tout le monde, que les enjeux et le cadre sont bien compris. Et plus on soigne cette relation en amont, plus on s’assure que la relation fonctionne au mieux par après. »

Actuellement, le projet est bien connu par les familles monoparentales, via le bouche-à-oreille, via les partenaires comme la Maison des Parents Solos ou d’autres acteurs qui soutiennent les familles monoparentales. Mais le gros enjeu, comme on le rappelle à la Ligue, c’est vraiment d’avoir davantage de volontaires. « Nous essayons vraiment de travailler sur ça, de faire connaître le projet auprès des volontaires pour pouvoir répondre aux demandes des familles qui sont en attente. » Et il y en a beaucoup.

Anoutcha Lualaba Lekede, avec La Ligue des familles

Pour devenir accompagnant·e CABANE
Contacter Hélène Bougaud
Tél. : 02/ 5077.72.19
Mobile : 0478.96.08.49
Mail : h.bougaud@liguedesfamilles.be

Il est aussi possible de participer aux rencontres-infos mensuelles.
Plus d’infos sur : https://liguedesfamilles.be/cabane


[1] https://liguedesfamilles.be/cabane
[2] Idem.
[3] Ce témoignage est repris de la Ligue des familles.

TWOgether, le Collectif des Binômes solidaires

Cabane est un projet de la Ligue des familles, mené en collaboration avec la Maison des Parents Solos et le Petit Vélo Jaune. Ces trois associations font partie du Collectif TWOgether qui a été créé le 5 décembre dernier à l’occasion de la Journée internationale du Volontariat.  Aux côtés de ces trois associations, il y a également : Bras dessus Bras dessous, Peluche et Singa Bruxelles. Ce sont toutes des associations qui font de l’accompagnement solidaire, qui créent des binômes solidaires. L’idée, à chaque fois, est d’associer un·e volontaire avec une autre personne issue de publics différents. Pour Cabane, ce sont donc des binômes pour des enfants de familles monoparentales. Pour Bras dessus Bras dessous, ce sont des aînés. Pour Peluche, des enfants placés par les services d’aide à la jeunesse, etc. Pour Singa Bruxelles, de nouveaux arrivants. Pour le petit Vélo Jaune, ce sont des familles plutôt isolées socialement ou économiquement et qui ont un enfant de moins de trois ans. La méthodologie est similaire à celle de Cabane, mais le public est différent.

Si ces différentes associations se sont mises ensemble, c’est parce qu’elles se sont rendu compte qu’elles avaient des objectifs similaires et qu’elles pouvaient mutualiser certaines actions pour se faire connaître auprès du grand public ou auprès des bailleurs de fonds, pour rechercher des volontaires par exemple.

Hélène Bougaud : « Nous collaborons autour d’un socle commun de valeurs qui sont : la posture bienveillante, l’autonomie, la solidarité, le bénévolat et l’encadrement professionnel de la relation. Nous partons vraiment de cette idée qu’un binôme solidaire est une idée hyper simple, peu coûteuse, mais très puissante puisqu’elle consiste à mettre en relation deux personnes qui vont cheminer ensemble. Il n’est nullement question d’un ou d’une bénévole qui rend service à la personne. C’est vraiment au contraire un lien, une relation qui se créée entre deux personnes et qui apporte finalement aussi bien à la personne accompagnée qu’au volontaire. Créé dans la bienveillance et la solidarité, ce lien devient un vrai levier pour améliorer les situations de vie. Ça peut être rompre l’isolement des personnes âgées pour Bras dessus Bras dessous, accompagner une famille monoparentale pour Cabane, aider des enfants en difficulté pour Peluche, etc. ».

L’objectif poursuivi par les associations du collectif est de créer des espaces de rencontres et du lien, c’est vraiment, à chaque fois, recréer le village. Pour Cabane, l’objectif est réellement de recréer le village autour des familles monoparentales, se basant ainsi sur ce proverbe africain qui dit qu’il faut tout un village pour élever un enfant.

Sur la même thématique