DiversÉchos des politiquesNuméro
10.09.2025
Numero: 23

Echos des politiques : l’actu des élus au Parlement bruxellois

Les élu·e·s au Parlement de la Commission communautaire française (Cocof) s’expriment sur des sujets d’actualité relatifs à la santé et au social en Région bruxelloise. Pour cette livraison, les parlementaires DéFI, MR, Ecolo, Les Engagés, PS et le PTB ont partagé leurs réflexions sur le dossier de cet e-Mag Bxl santé n°23 qui porte sur la situation de Bruxelles en matière de drogues et la réduction des risques, la prévention et les soins à l’attention des usagers.

Emag Echos politiques

Bruxelles selon le modèle portugais

La répression n’a jamais fait reculer la consommation de drogues. Elle a seulement renforcé la stigmatisation et l’exclusion. À Bruxelles, il est temps de changer de paradigme : les drogues doivent relever du Ministre de la Santé, et non plus du Ministre de la Justice.

DéFI défend une approche de santé publique inspirée du modèle portugais, qui met fin à la criminalisation des consommateurs. Il s’agit de les considérer comme des patients à accompagner, et non comme des délinquants à punir. Cela implique de développer l’accompagnement psychosocial, les programmes de substitution et les salles de consommation sécurisées. Ces dispositifs sauvent des vies, réduisent les overdoses et redonnent une chance de réinsertion sociale.

Mais sans une meilleure gouvernance, ces outils resteront marginaux. Bruxelles souffre d’un éclatement institutionnel qui freine l’efficacité des politiques menées. DéFI appelle à une coordination interinstitutionnelle claire, associant Région, Communautés, communes et associations de terrain, pour enfin dépasser les logiques en silo.

La prévention auprès des jeunes doit bien sûr rester un pilier. Mais seule une approche intégrée, articulant prévention, réduction des risques et réhabilitation, permettra d’apporter des réponses humaines, cohérentes et durables à un enjeu qui traverse toute notre société.

Charles Hosten,
attaché parlementaire pour le groupe DéFI au Parlement francophone bruxellois

Pour une approche globale et préventive de la gestion des risques liés aux drogues

Sous la législature 2019-2024, les écologistes au pouvoir à Bruxelles ont opéré une avancée en matière de gestion des risques liés aux drogues: l’adoption d’une approche de santé publique fondée sur la réduction des conséquences négatives des substances psychoactives, contre un modèle aussi prohibitif qu’inefficace.

Après des années de plaidoyers du secteur, les écologistes ont fait voter un cadre légal régional pionnier en matière de gestion des assuétudes[1]. Ainsi, la première salle de consommation à moindre risque (SCMR) a ouvert ses portes en mai 2022. Le groupe Ecolo a également fait adopter un décret permettant enfin aux services comme Modus Vivendi de fournir des médicaments essentiels et du matériel stérile, en toute sécurité[2].

La deuxième SCMR ouvrira ses locaux en septembre prochain à Molenbeek dans le quartier Ribaucourt, l’ambition étant de développer un véritable réseau de structures adaptées aux quartiers, deux salles ne suffisant pas à répondre aux besoins des usagers nécessitant un accompagnement psycho-social digne et optimal. Il conviendra d’en assurer la défense et la pérennité face aux postures conservatrices et répressives en présence.

Farida Tahar,
députée et présidente du groupe Ecolo au Parlement francophone bruxellois


[1] L’ordonnance du 22 juillet 2021 relative à l’agrément et au subventionnement des services actifs en matière de réduction des risques liés aux usages de drogues permet pour la première fois l’instauration de Salles de Consommation à Moindre Risques (SCMR), mais également la distribution de kits d’injection, l’échange de seringues, le testing des drogues de synthèse, l’accès aux services à bas seuils pour les personnes toxicomanes, etc.
[2] Décret du 15 juin 2023 visant à modifier le décret relatif à l’offre de services ambulatoires dans les domaines de l’action sociale, de la famille et de la santé afin de leur permettre de fournir les médicaments nécessaires à leur mission de réduction des risques.

Soutenir la santé et la dignité des personnes, oui ; tolérer les trafics et les nuisances, non

À Bruxelles, la lutte contre la toxicomanie exige une approche à la fois humaine et efficace. La priorité est claire : protéger la santé publique, restaurer la sécurité dans l’espace urbain et offrir de vraies voies de sortie aux personnes dépendantes. Le MR veut agir à la fois sur la sécurité et sur le sevrage complet, en articulant prévention, traitement, répression ciblée des trafics et réduction des risques. Cette approche a notamment montré, en Suisse, qu’elle peut faire reculer la mortalité, la criminalité liée aux stupéfiants ainsi que la consommation visible dans la rue. 

Concrètement, cela signifie intensifier la prévention, accélérer l’accès aux soins et aux traitements de substitution, et frapper les réseaux qui exploitent la détresse des usagers, tout en accompagnant ces derniers sans jugement. La réduction des risques a sa place lorsqu’elle diminue les dommages sanitaires et sociaux, mais elle ne peut jamais devenir un alibi à l’abandon de l’espace public ni à la banalisation de l’usage de drogues. C’est pourquoi il est important de mettre en place un encadrement strict, une politique coordonnée et une évaluation systématique de chaque dispositif, afin d’éviter l’émergence de zones sensibles et de garantir la tranquillité des riverains.  

La politique bruxelloise doit rester cohérente : soutenir la santé et la dignité des personnes dépendantes, oui ; tolérer les trafics et les nuisances, non. Car le projet de vie d’un citoyen ne peut pas être la dose suivante. Il doit être un retour dans la société. 

Gaëtan Van Goidsenhoven,
député et chef de groupe MR au Parlement francophone bruxellois

Prévention, soins et répression ciblée

À Bruxelles, les problèmes liés à la drogue ne se limitent pas aux faits divers. Dans certains quartiers, les habitants subissent les nuisances du trafic, tandis que des usagers consomment dans la rue, sans accompagnement.

Face à cette double réalité – trafic et toxicomanie – , le PTB défend une approche de santé publique globale, qui combine prévention, soins et répression ciblée. L’addiction est une maladie, pas un crime. Il faut donc renforcer les centres de soins et déployer des équipes mobiles psychosociales capables d’aller vers les usagers. L’ouverture de salles de consommation à moindre risque, comme celles actives à Bruxelles, doit être élargie : elles réduisent les overdoses, protègent la santé et orientent les usagers vers un suivi.

Le prochain gouvernement bruxellois devra investir bien davantage dans la prévention et dans les organisations de terrain qui travaillent chaque jour avec les personnes en dépendance. Car agir en amont reste essentiel : via les écoles, les maisons de jeunes et le tissu associatif, pour offrir des perspectives aux jeunes et limiter l’attrait du trafic.

En parallèle, il faut cibler les grands réseaux criminels – par la levée du secret bancaire et un renforcement des douanes notamment – et s’attaquer aux causes sociales, comme la pauvreté, ou le chômage, rendre accessible le logement qui aujourd’hui est devenu inabordable. Tant que ce terreau existe, la toxicomanie trouvera à s’enraciner.

Françoise De Smedt,
députée et cheffe de groupe PTB au Parlement francophone bruxellois

Refuser l’indifférence et miser sur l’accompagnement

À Bruxelles, la question des drogues constitue un défi social, sanitaire et sécuritaire évident. Ceci comme dans de nombreuses grandes villes belges ou étrangères (Anvers, Tarragone, Amsterdam, Zurich…)

En tant que criminologue et ancienne présidente du CPAS de la Ville de Bruxelles, j’ai toujours défendu une approche fondée sur la réduction des risques et l’accès aux soins. C’est dans cet esprit que nous avons soutenu l’ouverture en Région Bruxelloise de la première salle de consommation à moindre risque, une étape essentielle pour répondre avec humanité et efficacité à la toxicomanie.

Les institutions de terrain comme Transit ou la MASS jouent un rôle indispensable : elles offrent un accueil, une écoute, un accompagnement médical et social qui permettent de retisser du lien avec les personnes les plus fragilisées. La prise en charge ne peut reposer sur l’exclusion ou la criminalisation, mais sur la mise en confiance, le suivi médical et l’accrochage social.

Ce phénomène peut toucher n’importe qui : la santé mentale est un enjeu majeur et la crise du Covid n’a fait qu’aggraver la situation. Nous avons une responsabilité collective à y répondre.

Investir massivement dans les dispositifs de soins, dans les structures d’accueil de jour comme de nuit, c’est investir dans la dignité humaine. Une attention particulière doit être portée aux plus vulnérables, notamment les femmes et les jeunes qui vivent des situations de précarité et de violence accrues.

Ces politiques ne rapportent pas financièrement, mais elles contribuent aussi à la tranquillité publique et à la salubrité de nos quartiers. Elles traduisent également un choix de société : refuser l’indifférence et miser sur l’accompagnement, pour construire une ville plus humaine, solidaire et apaisée.

Karine Lalieux,
députée PS au Parlement francophone bruxellois

Drogues à Bruxelles : refuser l’habitude, choisir l’action

À Bruxelles, la scène devient familière : une seringue abandonnée, des jeunes qui dealent près d’une école, un usager affalé sur un banc, sous le regard inquiet des familles.
La consommation et le trafic de drogues ne sont plus une réalité lointaine : ils s’installent au cœur des quartiers, visibles en pleine rue, générant insécurité, nuisances et sentiment d’impunité. De plus en plus de mineurs sont happés par les réseaux. Des vies se brisent dès l’adolescence, des familles explosent et des quartiers se fragilisent. Dans le même temps, la consommation progresse dans toutes les couches sociales, rongeant le tissu urbain et accentuant les fractures entre habitants.

Face à cette urgence, Les Engagés portent une conviction claire : la toxicomanie est d’abord une question de santé publique, mais aucune réponse durable n’est possible sans une lutte implacable contre les narcotrafiquants. Protéger la dignité humaine et garantir la sécurité vont de pair.

Nous proposons :

  • Davantage de moyens pour démanteler les réseaux et une tolérance zéro envers les trafiquants.

  • Un accompagnement renforcé des personnes dépendantes : équipes de terrain, lieux d’accueil sécurisés et salles de consommation supervisée.

  • Une prévention accrue dès l’école pour retarder ou éviter l’entrée dans la consommation.

  • Une collaboration réelle et renforcée entre communes, police, justice et acteurs sociaux-sanitaires.

Protéger Bruxelles, c’est refuser l’abandon, protéger nos enfants et agir sur tous les fronts : sécurité, santé, cohésion sociale. 

Sofia Bennani,
députée Les Engagés au Parlement francophone bruxellois

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